Je m’appelle Orlane, je file à toute vitesse sur mes 34 ans et aujourd’hui je vais vous raconter mon histoire, du moins une des plus belles parties de celle-ci : la place qu’a pris le bénévolat dans ma vie. Mais pour en parler, je dois aussi vous raconter comment tout a commencé et pourquoi j’en suis arrivée là.
Ciel nuageux
Nous sommes en 2010, c’est alors mon premier boulot, sortie de bac professionnel, mon premier CDI, j’ai 20 ans. Dix ans vont s’écouler, dix ans que je passerai dans cette entreprise, à ne vivre que pour elle, pour mes supérieurs, à changer plusieurs fois de région pour devenir responsable, avoir plus de vendeurs avec moi et un plus gros chiffre d’affaires à gérer…
Et bien sûr, le tout avec son lot d’ennuis, évoluant en même temps que moi…
Nous savons très bien que le commerce est difficile, mais c’est un métier, il se vit et peut même nous passionner !
Les supérieurs hiérarchiques sont souvent intransigeants et lorsque nous sommes jeunes, nous croyons bêtement que pour évoluer il faut juste avancer, courir, dire oui à tout… C’est ce que j’ai fait, et j’ai foncé tête la première dans le piège.
Coups de tonnerre
J’ai été à la merci d’une manager peu scrupuleuse voire perverse narcissique, qui me « possédait » au lieu de m’apprécier. Pour tout vous dire, nous en étions même arrivées à ce qu’elle choisisse mes propres dates de vacances. Elle montait tout le monde contre moi sans aucune raison, je n’avais plus aucune liberté de penser, j’étais simplement programmée pour travailler pour elle, au boulot et en dehors, même pendant les vacances. Et bien sûr, interdiction d’être malade !
Dois-je vous avouer que j’ai dû voir un allergologue parce que j’étais trop souvent malade à son goût, alors qu’en dix ans je n’ai posé qu’un seul arrêt maladie, pour elle ?! J’encaissais tous les coups, toutes les remarques, j’obéissais, je subissais, je n’avais plus de vie et tout cela alors que je n’avais pas encore 30 ans…
Mais en fin de compte, je me suis éclatée, j’ai évolué, j’ai grandi. Évidemment j’ai eu des hauts, des bas et à la fin, de sacrés coups durs… Mes proches m’écoutaient, me conseillaient, mais ne me comprenaient pas. Alors forcément, il y avait toujours les réponses faciles « pars« , « cherche ailleurs« . Mais comment fait-on lorsqu’on est au bout moralement et qu’on ne se projette plus, que l’on vous fait comprendre que de toute façon vous ne pourrez jamais rien faire d’autre de votre vie, et qu’en plus, vous le faites mal ? On a beau être bien entouré, dans certaines situations, on se sentira toujours aussi seul.
Fin de l’averse
Fort heureusement, cette situation s’est terminée aussi vite qu’elle avait commencé, suite à une belle rencontre, mon futur conjoint. J’ai eu un déclic, j’ai pu rencontrer le grand patron de ma boîte qui, lui, était très satisfait de mon travail et ne savait pas du tout ce qu’il se passait. Évidemment, je n’ai rien dit et en seulement trois mois, j’ai pu obtenir une rupture conventionnelle pour partir très vite et facilement de cet enfer.
Et après ? Qu’est-ce qu’on fait lorsqu’on est brisé et qu’on se croit incapable de quoi que ce soit ? À une heure de mes proches, j’étais dans un trou sans fond. Alors qu’il me fallait rebondir, dans ma tête j’étais seule et loin de tout, alors qu’en réalité c’était littéralement tout l’inverse !
J’ai donc décidé de prendre une année sabbatique pour pouvoir faire ce que je n’avais pas pu faire avant, j’allais essayer de penser à moi et surtout aux autres ! Cela peut paraître bête, mais c’était important pour moi d’accorder du temps pour contribuer à « faire le bien », pour diffuser toute la bienveillance que je n’avais pas reçue. C’était devenu une mission, pour que personne ne vive ce que j’avais vécu. Me croyant superhéroïne, je voulais réparer toutes les injustices et changer le monde : chanson des bisounours !
Rayons de soleil
J’ai commencé par le plus simple près de chez moi, je suis allée à la SPA de ma région et j’ai commencé à faire des promenades avec des chiens, des sorties, j’ai rencontré de nouvelles personnes. Là, commence à se créer un nouveau rythme et de nouvelles habitudes. On va donc revoir des gens qu’on apprécie, on va s’occuper d’adorables boules de poils (chiens et chats), on oublie, très vite, tout le reste. Alors oui, on peut se dire que c’est dur car ce sont des animaux abandonnés et qu’ils sont tristes, que l’on va être triste aussi, mais ce n’est rien, car on sait que l’on vient pour leur faire passer une bonne journée et ça fonctionne très bien !
À ma grande surprise, toujours dans mon rôle d’héroïne, je me rends compte que le bénévolat (toutes associations concernées), c’est comme une entreprise, qu’il y a toujours une hiérarchie naturelle bien que tous soient bénévoles.
Sans prendre de recul, on peut très vite tomber dans une ambiance malsaine, avec des rivalités et des mauvais commérages, des gens qui déblatèrent contre d’autres personnes travaillant gratuitement…
C’est comme ça et ça le sera toujours, avec ou sans moi !
Bon, on oublie donc le rôle de l’héroïne, on retrouve la vraie vie, une asso c’est une organisation, c’est normal, chacune a son fonctionnement et personne n’arrivera sur son cheval blanc pour y faire la révolution !
Sortant d’une mauvaise expérience, je parviens rapidement à prendre mes distances et je trouve un rythme qui me laisse heureusement en dehors de tout ça. Lorsque j’arrive là-bas, je rentre dans une bulle de bien-être, toujours en plein air, même sous la pluie ou dans la boue et je passe les meilleures des journées !
La vie redevient simple et belle, je me retrouve, je respire, je vis !
Arc-en-ciel
Pour continuer sur ma lancée, je m’inscris en plus à la Maison des Associations de ma ville qui partage mon profil à plusieurs assos. La seule qui m’appelle est France Terre d’Asile. Lors de mon entretien avec le directeur de l’antenne, j’ai une heureuse surprise lorsqu’il me propose de faire du soutien scolaire auprès de jeunes mineurs protégés, fraîchement arrivés en France.
La plupart ont survécu à d’atroces souffrances pour avoir le droit d’arriver jusqu’en France…
Là, je me rends compte que ce que j’ai vécu est vraiment minime par rapport à eux. Quand je les vois, je les aide à apprendre le français, une fois par semaine. Je les verrai toujours avec le sourire, toujours heureux d’apprendre. Nous passons de supers bons moments, nous jouons, nous discutons, nous rigolons, j’ai souvent les yeux humides.
Alors non, il ne faut pas minimiser ce que l’on vit ou ressent, mais dans cette expérience, ce sont eux qui m’auront enseigné le plus ! Chaque semaine j’en apprends un peu plus sur leurs parcours, leurs histoires et malheureusement leurs déboires en France…
J’ai également fait partie d’une troisième association qui a dû fermer à cause du Covid. Ce qui m’a sincèrement arrangée car il faut aussi garder en tête qu’à force de vouloir tout faire en même temps ou vouloir être partout, on ne fait plus rien. Il faut savoir s’investir dans moins de choses à la fois car cela permet de le faire dans de bien meilleures conditions et de s’investir à fond !
Soleil lumineux
Aujourd’hui, j’ai à nouveau changé de région. Après cinq ans de relation à distance avec mon conjoint, nous nous rapprochons enfin. Il y aurait trois longs romans à écrire dessus ! Il était impossible pour moi de ne pas retrouver une nouvelle association, c’est devenu vital ! Je suis donc inscrite auprès d’une asso de soutien aux mamans (pour faire du soutien scolaire) et, grâce à une amie, auprès de La Croix Rouge où je participe au service du restaurant social. J’ai fait quelques maraudes le soir également et actuellement je participe au développement d’un projet de mentorat créé afin d’accompagner des jeunes en situation de vulnérabilité, afin de les guider dans leur vie ou de les aider sur des tâches administratives liées à leur vie professionnelle ou personnelle.
C’est l’une des missions les plus importantes à mes yeux car elle me permettra de diffuser toute la bienveillance acquise grâce aux autres assos, grâce à tous les cœurs d’or que j’ai rencontrés, ceux qui m’auront permis d’être celle que je suis aujourd’hui.
Ciel étoilé
Le bénévolat m’est devenu tellement vital, qu’à l’inverse du passé, j’ai demandé mes heures de travail en fonction du bénévolat pour toujours avoir le temps d’en faire !
On pourrait aussi facilement croire que s’inscrire pour être bénévole, c’est pour se « montrer » ou se faire bien voir auprès de tous. C’est ce dont j’avais peur alors que j’étais heureuse de partager mes expériences avec mes proches. Je ne voulais surtout pas que l’on se dise que je me sentais supérieure grâce à mes bonnes actions. C’était dans ma tête car je me voyais toujours incapable de tout, sans loisirs, sans passion. Mais grâce au bénévolat, j’ai énormément appris sur moi-même, sur la vie, sur les autres !
J’ai appris à entendre, à écouter, à aider les gens et à relativiser simplement !
Finalement, contrairement à ce que l’on pourrait croire, on apprend beaucoup plus que ce que l’on peut transmettre, c’est la plus belle leçon de vie que l’on puisse recevoir, donner sans rien attendre en retour !
Je suis tellement fière de toujours participer à tous ces projets, de donner tout ce que je peux sans regret et je sais que je donnerai toujours le maximum, j’irai toujours au bout des choses quoi qu’il arrive.
Mais surtout je suis extrêmement chanceuse, chanceuse de vivre tout ça, toutes ces rencontres et ces vies incroyables, j’ai de la chance que tous ces gens m’aient accueillie dans leur vie, c’est indéniable.
(Je n’ai pas précisé ce qui me semblait évident : vous aurez souvent la chance de rencontrer des gens avec des cœurs en or, comme vous n’en avez jamais vus !)
Alors non, aujourd’hui je ne suis pas plus forte qu’avant, je resterai la femme loyale et hypersensible que je suis, j’ai juste appris à voir les choses autrement, car je continue de croire que le bien est toujours autour de nous, mais qu’il faut simplement savoir où le chercher pour le trouver.
Si vous êtes perdus, que vous ne savez plus où regarder, ouvrez les yeux, souriez et laissez-vous guider !
Merci
Si comme Orlane, tu as envie de parler de tes aventures dans le bénévolat et le pourquoi tu as fais ce choix, n’hésites pas à témoigner !