« Le deuil de son enfant. Vous avez 2 heures ». Cela pourrait faire un bon sujet de philosophie, parce que ces deux mots sont presque des contradictions dans une même phrase.
Mais voilà, même si l’on pense que la médecine est toute-puissante, même si l’on pense que cela n’arrive qu’aux autres, un jour, quand ça nous tombe dessus, eh bien cela remet en question tout un tas de certitudes.
Vivre avec le deuil
Chacun et chacune le vit différemment. Mais ce que je sais pour ma part, c’est que je fais partie de la team #undeuilcasefinitpas. On « ne fait pas le deuil », on apprend à vivre avec, on s’adapte, on s’habitue, on grandit, on s’apprend puis… on célèbre.
Cela va bientôt faire 11 ans que j’ai dit au revoir à ma fille et aujourd’hui, je peux le dire, je ne changerai rien.
En revanche, ce qui est sûr, c’est que pour « survivre », j’ai dû (re)venir à moi, à qui je suis vraiment, et ce chemin ne s’est pas fait sans quelques ajustements qui ont grincé, fait tanguer ma vie que je croyais bien réglée, quasiment aboutie, ayant trouvé un rythme de croisière. Ah ah, innocente que j’étais !
Le deuil de ma fille, un cadeau
Finalement, l’apaisement prend la place du feu dans les veines, c’est une affaire de temps, une affaire aussi de mains tendues, d’aides cherchées et trouvées. C’est aussi accepter que le deuil est un chemin et non une destination. Accepter que ces fichues cinq étapes que nous lisons dans tous les bouquins « Le déni – La colère – Le marchandage – La dépression – L’acceptation », puissent alterner dans la même heure, la même journée, puis le même mois. Ce n’est pas du tout une étape après l’autre. Moi, je croyais cela. Quand je pensais en avoir dépassé une, je me disais, « Chouette, c’est déjà ça », sans comprendre pourquoi le tsunami des émotions me remettait une lame de fond dans la tête.
Et puis, voilà. Ce chemin, aujourd’hui, je le considère comme le cadeau que ma fille m’a offert. Bien sûr, de temps en temps, mon esprit s’envole vers des pensées tristes. C’est OK. Mais le plus souvent, c’est la joie qui domine. Elle m’a aidée à trouver le chemin vers la femme que je suis, m’assumant et m’aimant comme j’aurais dû le faire depuis bien longtemps.
La présence de ma fille ? Elle est quotidienne. Sans forcément que j’y pense d’ailleurs. Je dis souvent qu’elle est simplement invisible, elle est juste différente de la présence de son aînée, qui elle, a une présence « physique », dans ma vie.
Oui, j’aurais aimé faire du vélo avec elle, j’aurais aimé lui lire des histoires. Mais avec elle, j’ai intégré que je vivais simplement des moments différents : c’est un recul différent sur une situation, une intuition qui me pousse vers une autre aventure, des pensées partagées avec elle qui me font réfléchir.
Bref. Voilà. C’est ma vision du deuil. Très personnelle. Je suis certaine que chacun(e) a son propre GPS sur ce chemin. Mais ce qui est certain, c’est qu’il faut s’écouter, oser se laisser traverser par ses émotions, s’entourer de gens qui nous font du bien. Et s’approcher petit à petit du cadeau offert par nos petits bouts.
Si vous aussi vous avez fait face à la perte d’un enfant, n’hésitez pas à nous déposer votre témoignage en cliquant ici