Dans l’article du jour, je vous propose quelques pistes de réflexions sur le vaste sujet que représente la maternité. Si l’on écoute les mères, chacune vous raconte sa version de la maternité. Car oui, il y a autant de façons de vivre une maternité que de femmes dans le monde. Au cours de mon parcours de médecin en PMI, j’ai rencontré des centaines de mamans. Venues de tous les continents, elles m’ont appris combien leur rôle auprès de leur bébé était vital pour son développement et son épanouissement. Et aussi comment elles trouvent des ressources en elles et dans leur entourage conjugal, familial et amical, pour répondre au mieux aux besoins de leur bébé. Beaucoup m’ont montré et m’ont dit combien la présence du père de leur bébé leur manquait. Nous verrons plus loin le rôle et la place du père, la façon dont il sécurise la relation entre la mère et leur enfant.
Quelques rappels sur nos origines
Poussières d’étoiles, nous venons d’un très loin, de temps et d’espaces, dont les connaissances scientifiques actuelles nous font entrevoir les évolutions du vivant sur notre planète Terre.
Espèce de mammifères issue de l’évolution d’une lignée de grands singes qui se sont différenciés au fil des siècles pour aboutir à l’espèce humaine dont nous sommes des représentants, appelés Homo Sapiens.
Un raccourci historique, pour nous rappeler que nous sommes des êtres de chair et d’os, dotés de conscience et de langage verbal.
La maternité : dans l’histoire
Jusqu’à une période récente, la maternité était une période à risques pour les femmes. Le taux de mortalité maternelle était élevé, du fait de complications infectieuses ou hémorragiques après l’accouchement, sans compter les complications pendant l’accouchement lui-même. Il en allait de même pour les nouveaux nés qui décédaient pendant l’accouchement ou après leur naissance. Les progrès de la médecine ont permis de sécuriser la grossesse et l’accouchement, et de réanimer des nouveaux nés en détresse.
Ces progrès ne sont pas les mêmes selon le niveau économique des pays où accouchent les femmes et où naissent les enfants. Dans de nombreux pays, l’accès aux soins et le manque d’équipements sanitaires en moyens matériels et humains, continuent d’exposer les femmes à des accidents obstétricaux qui peuvent leur coûter la vie et ou celle de leur bébé. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) œuvre à améliorer les conditions sanitaires dans le monde entier.
Il est à noter aussi que dans les pays les plus riches, comme la France, des femmes en situation de grande précarité psycho-sociales, sont également exposées à des risques vitaux pour elles ou leur bébé. Des services publics et des associations travaillent en lien et coordonnent leurs actions pour sécuriser les parcours de soins de ces femmes fragiles.
La maternité : une histoire de rencontres
Notre venue au monde a été conçue par la rencontre d’un homme et d’une femme, qui, dans un élan amoureux (dans le meilleur des cas), ont permis à un ovule et à un spermatozoïde, de nous donner forme humaine, pendant les neuf mois de grossesse de notre mère. Peut-être notre père nous attendait aussi, mais différemment, sans nous porter dans son corps, mais dans ses pensées.
À l’issue de ce délai de neuf mois, si tout se passe comme prévu, notre mère a accouché, puis nous sommes venus au monde, entourés d’une famille. Le moment tant attendu de la rencontre, pour beaucoup de parents, arrive. Nous devenons ainsi héritiers de l’histoire de chacun de nos parents, eux-mêmes héritiers des générations précédentes.
La maternité : une histoire de liens
Après notre vie fœtale, dont nous n’avons pas gardé de souvenirs conscients, mais seulement des traces mnésiques inconscientes de sons, de sensations cutanées, de sensations d’équilibre dans un espace aqueux, nous voilà précipités dans un monde aérien, dépendants des soins prodigués par notre mère, pour survivre. C’est le temps dit de l’attachement précoce, ce temps où mère et bébé recherchent un équilibre relationnel, un accordage des rythmes de vie de l’une et l’autre.
La maternité : une histoire d’émotions
L’article de Charlotte “Être mère” illustre ces différentes étapes d’accès à la maternité, étapes faites d’imprévus, de surprises, de hauts et de bas. Elle souligne les moments de solitude où l’attente du bébé, puis sa naissance, transforment son corps, son esprit et sa psychée. Elle a vécu une phase où elle s’est sentie désemparée, mais elle a trouvé en son conjoint, devenu père, le soutien dont elle avait besoin.
La maternité : une histoire de transmissions
Notre société moderne, hautement technologique, y compris dans le domaine médical, au point de concevoir des enfants en dehors des corps de la femme et de l’homme, complique l’accès à la maternité et à la paternité.
Nous ne sommes pas préparés à devenir père et mère par des connaissances rationnelles. C’est notre histoire familiale, la place que nous avons occupée étant enfant dans notre famille, ce que les générations précédentes nous ont transmis, y compris des fantômes encombrants, qui nous portent à devenir parents. C’est-à-dire des adultes responsables du destin de nos enfants, les élever à être à leur tour des adultes autonomes.
La maternité : une histoire de séparations, de la nécessaire place du père
Après la phase de dépendance complète du bébé aux soins de sa mère, où le bébé ne se sent pas séparé de sa mère, donc n’a pas conscience de son être individué, vient le temps de la séparation psychique entre la mère et le bébé. Celui-ci marque la fin de leur relation fusionnelle qui évoluait depuis la grossesse. C’est comme une deuxième naissance, celle de notre conscience d’être un individu différent de notre mère. Le père va permettre au bébé de se séparer de sa mère, sans que le bébé, ni la mère, n’en souffrent trop.
Le père, par sa présence et sa parole, signifie à la mère que l’enfant, pour continuer à grandir, va devoir se séparer d’elle, psychiquement, comme il s’est séparé de son corps, lors de l’accouchement. Par ses qualités sécurisantes, si elles sont reconnues comme telles par la mère, le père va accompagner cette étape de séparation et contenir les émotions que génère cette séparation.
Comme s’il disait à la mère et au bébé : “ vous pouvez vous séparer sans que votre lien ne soit rompu, votre lien évolue, vous allez survivre à la séparation ”. Il signifie ainsi à l’enfant qu’il peut continuer à grandir, à aller explorer les chemins de l’autonomie, sans avoir besoin de rester coller à sa mère, comme le disent les expressions populaires : » tu peux sortir des jupons de ta mère » ou » lâche lui les baskets « , parole qui s’adresse plus aux adolescents, autre étape importante de notre accès à l’autonomie, qui fait de nous des adultes, moment où nous négocions notre appartenance à notre culture familiale et à notre culture sociétale.
Puis le bébé va accéder au langage oral, à la parole. Ses nouvelles capacités de communication lui donnent accès à la vie sociale. Il en est de même de l’acquisition de la marche, qui a précédé de peu l’éclosion de la parole. Être marchant, le bébé a maintenant la capacité de s’éloigner du corps de sa mère. Il prend ses premières initiatives de découverte du monde qui l’entoure, premiers pas vers une autonomie qui ira en grandissant.
La maternité : une histoire merveilleuse
Notre émerveillement de parents, accompagnant chaque étape du développement de nos enfants, est enraciné dans les souvenirs de notre enfance, et aussi de l’enfance de nos parents. Il participe de notre étonnement à nous sentir vivants, et inscrits dans la transmission, pas seulement de nos gènes, mais aussi du mystère de cette vie apparue sur une planète perdue dans l’immensité de l’Univers.
La maternité : quelle est votre histoire ?
Chères lectrices, à la suite de ces pistes de réflexion sur la maternité, la parole est désormais la vôtre. Comment avez-vous vécu votre maternité ? Qui est-ce qui vous a soutenu dans ce moment de changement existentiel majeur ? Vous pouvez solliciter votre conjoint pour rédiger votre témoignage, il n’en sera que plus riche. Charlotte et son équipe ont hâte de les lire.
À bientôt, Docteur Xavier Cleray
